Quelles perspectives vous donnent l’USOE et plus largement FH SUISSE dans l’atteinte de ces challenges ?
Afin de conserver la valeur de ce diplôme sur le marché du travail, il faut maintenir une orientation fondée sur les compétences pratiques, bien adaptées aux évolutions des connaissances scientifiques, techniques et économiques. Des enjeux comparables sont observés dans d’autres filières techniques sanctionnées par un Bachelor. Défendre ces objectifs nécessite une compréhension mutuelle. C’est le rôle des associations sectorielles comme l’USOE, dont le message doit ensuite être porté d’une seule voix par la faîtière FH SUISSE.
Qu’est-ce qui vous a motivé à vous investir pour défendre la branche ?
De manière générale, le vin jouit d’une bonne réputation, synonyme de partage et de convivialité. Grâce à l’avènement des connaissances et le développement de la formation, la qualité des vins suisses n’a cessé de progresser depuis vingt ans. Ce qui est moins connu sont les impératifs de la production, de la vigne à la cave, pour assurer cette qualité et cette réputation. Une production indigène qui réponde aux attentes organoleptiques du consommateur, aux impératifs environnementaux et qui reste concurrentielle sur le marché suppose une formation très pointue. La vulgarisation et l’information du public sur ces sujets est indispensables pour sensibiliser aux réalités du terrain. Cela contribue à valoriser notre savoir-faire tout comme le produit de notre travail, le vin.
Et qu’est-ce qui vous a amené à faire de la politique ?
Mon engagement politique a débuté avec l’Assemblée constituante genevoise en 2008. Ce qui m’avait motivé à l’époque reste d’actualité : donner aux questions agricoles la place qu’elles méritent dans le débat politique et contribuer à favoriser une meilleure compréhension des réalités des professionnels de la terre. Cette contribution a rendu possible l’introduction d’un article sur l’agriculture dans la Constitution genevoise. Je me suis alors rendu compte à quel point il était indispensable d’être présente dans les débats pour apporter une information solide et documentée, légitimée par le parcours professionnel, pour que les élus puissent se faire une opinion objective. C’est une manière d’œuvrer pour l’intérêt général tout et en défendant ma profession ainsi que les autres métiers de la terre. C’est aussi une manière de contribuer à notre démocratie, fondée sur le système de milice, auquel je suis attachée.
Aujourd’hui comment sont organisées vos journées, en tant que conseillère nationale et vos différents mandats liés à la défense de la branche et la formation ? Est-ce qu’il y a encore du temps pour « pratiquer » le métier d’œnologue ?
Être élue au Conseil national, la plus haute instance législative du pays, est à la fois un honneur et une responsabilité. J’y dédie l’essentiel de mon temps, partagé entre les quatre sessions plénières de trois semaines chacune et les travaux de Commission. A cela s’ajoute le travail de documentation, préparation, information du public en prévision des scrutins populaires, communication… Il ne me reste en effet que peu de temps. Raison pour laquelle j’ai accepté des mandats en cohérence avec mes aspirations professionnelles, ce qui me permet de rester aux prises avec les défis techniques. Cela dit, je reste toujours active en tant qu’œnologue indépendante.
Quels ont été (ou sont) les plus grands challenges ou atouts en tant que femme dans le milieu de l’œnologie ? Elles sont peu nombreuses les œnologues, non ?
La progression des femmes dans les métiers de la terre, comme en œnologie, suit la tendance générale des métiers techniques. Nous étions deux dans ma volée il y a 20 ans. Depuis, certaines volées ont parfois été majoritairement féminines. La mécanisation a permis de faciliter considérablement certaines tâches qui nécessitaient force musculaire et endurance. Dès lors, les impératifs physiques du métier ne sont plus un obstacle. S’agissant des avantages, je dirais que même s’il n’y a pas de différence biologique entre homme et femme quant aux aptitudes sensorielles, la sensibilité des femmes au monde qui les entoure est un atout. L’œnologie n’est pas une science exacte, l’empirisme y joue un rôle certain. La capacité d’observer et de décider, dégagée du poids des stéréotypes masculins liés au vin par exemple, est sans doute une force.
Est-ce qu’il y a des astuces d’œnologues pour trouver/reconnaître des bons vins ?
Il y a une constante assez simple : plus un vin est complexe et plus son potentiel est grand, mais plus il est difficile à décrire de manière juste et exhaustive… Cela dit, la notion de « bon vin » est toujours conditionnée. Le rapport prix/plaisir peut être une manière de définir cette notion. Chaque occasion peut trouver son « bon vin ». Et chaque vin trouve sa « bonne occasion » d’être dégusté. Le meilleur vin est celui que vous avez dans votre cave lorsque vous en avez envie. Partager un moment de convivialité y contribue indéniablement. Et les vins suisses vous offrent à cet égard une palette infinie. A chaque jour son vin suisse !